Procédé et dispositif pour la conformation de pièces en bois massif

La présente invention concerne un procédé et un dispositif de conformation de pièces en bois massif.

Elle s'applique notamment, mais non exclusivement, à la conformation des planches ou bordés recouvrant la charpente de la coque d'un navire.

Traditionnellement, l'opération de conformation d'un bordé est effectuée par usinage d'un fût de forme appropriée. Il est alors nécessaire de trouver un arbre présentant un tronc ayant la forme recherchée, ce qui peut être extrêmement long et donc très coûteux.

Plus récemment, pour des pièces de relativement petites dimensions, cette opération est réalisée à partir d'une planche rectiligne, en soumettant la pièce à la chaleur humide d'une étuve pour la rendre malléable, puis en appliquant et en fixant la planche non conformée, encore à température élevée et humide, directement sur la charpente de la coque, la fixation du bordé sur chaque membrure de la charpente assurant la conformation de celui-ci à la forme de la coque.

Selon cette technique, la fixation du bordé doit être effectuée dans un temps très court, de l'ordre de quinze minutes avant que le bois retrouve sa rigidité d'origine. Cette opération est effectuée manuellement et nécessite une main d'oeuvre importante pour porter et forcer la planche à épouser la forme de la coque. Comme, les pièces en sortie d'étuve sont à température élevée, de l'ordre de100°C, cette opération est délicate et présente des risques importants de brûlures pour les personnes manipulant le bordé.

Il s'avère que cette technique ne peut être appliquée qu'à la fabrication de coques de relativement petites dimensions. En effet, à partir d'une certaine taille, les bordés deviennent trop lourds à manipuler et à mettre en place sur les membrures, et les forces nécessaires au cintrage et au vrillage du bordé lors de sa pose sur les membrures deviennent hors de portée de la force humaine ou très difficile à mettre en oeuvre dans un temps aussi court.

La présente invention a pour but de supprimer ces inconvénients. A cet effet, elle propose un procédé de conformation d'une pièce de bois à traiter, en vue de lui donner une forme cintrée, ce procédé comprenant une étape de soumission de la pièce à traiter à une atmosphère humide et à température élevée, pour la rendre malléable.

Selon l'invention, ce procédé est caractérisé en ce qu'il comprend :

• une étape préalable de positionnement et de réglage des positions respectives d'une pluralité de butées comprenant chacune une face d'appui, montées coulissantes sur des rails parallèles respectifs, la courbe reliant les faces d'appui des butées correspondant au profil de cintrage à donner à la pièce de bois à traiter,
• lorsque la pièce à traiter est devenue suffisamment malléable, une étape de disposition de la pièce de bois en travers des rails, en regard des faces d'appui des butées,
• une étape d'application de forces transversales sur la pièce à traiter pour appliquer celle-ci simultanément contre la face d'appui de chaque butée, et
• une étape de maintien de la pièce à traiter ainsi conformée jusqu'à ce qu'elle retrouve sa rigidité d'origine, à température ambiante.

Avantageusement, le procédé selon l'invention permet également de vriller la pièce à traiter. Il comprend à cet effet une étape préalable de fixation sur la face d'appui des butées et d'organes de poussée respectifs contre les butées, de cales ayant l'angle de vrillage que l'on souhaite obtenir au niveau de la butée correspondante.

Si la pièce de bois à traiter présente une section rectangulaire, les forces de cintrage sont appliquées sur la pièce, dans le sens de son épaisseur (perpendiculairement à l'une de ses deux faces latérales), le vrillage de la pièce étant obtenu à l'aide de cales ayant une face d'appui inclinée par rapport à la largeur de la pièce à traiter.

L'invention permet ainsi de traiter des pièces de bois de grandes dimensions, par exemple 11,5 m de longueur, 36 cm de large et 16 cm d'épaisseur, sans nécessiter d'interventions manuelles directes sur la pièce. Suivant les propriétés des types de bois utilisés, la conformation selon l'invention d'une pièce ayant ces dimensions permet d'atteindre une flèche de 1;6 m et un vrillage de 10 cm entre les deux extrémités de la pièce.

L'invention concerne également un dispositif pour la conformation d'une pièce de bois de forme allongée, par application de contraintes d'effort perpendiculairement à son axe longitudinal.

Selon l'invention, ce dispositif est caractérisé en ce qu'il comprend une pluralité de butées montées coulissantes sur des rails parallèles respectifs, chaque butée étant associée à :

• un élément de blocage de la butée sur son rail respectif, de manière à bloquer la butée en une position respective le long de son rail respectif, l'ensemble des positions des butées définissant le profil de cintrage à donner à la pièce à traiter, et
• un organe de poussée respectif conçu pour exercer une poussée suivant l'axe de coulissement de la butée en direction de celle-ci, pour appliquer la pièce à traiter contre la butée.

Avantageusement, la pièce à traiter présente une section transversale rectangulaire, chaque butée et chaque organe de poussée comprenant des moyens de fixation destinés à recevoir une cale ayant une face d'appui de forme appropriée pour vriller la pièce à traiter, lorsqu'elle est appliquée en force contre celle-ci.

Un mode de réalisation du dispositif de conformation selon l'invention sera décrit ci-après, à titre d'exemple non limitatif, avec référence aux dessins annexés dans lesquels

• La figure 1 représente schématiquement le dispositif selon l'invention ;
• La figure 2 montre d'une manière plus détaillée le dispositif de conformation représenté sur la figure 1 ;
• La figure 3 montre en coupe transversale une butée montrée en vue arrière, montée sur son rail ;
• La figure 4 montre une butée en vue de profil ;
• La figure 5 montre en vue de profil un organe de poussée.

La figure 1 représente un dispositif de mise en forme de pièces de bois comprenant une étuve 1 ayant une forme allongée correspondant à celle des pièces de bois à traiter, et comprenant un chemin de roulement destiné à faciliter le passage des pièces de bois dans l'étuve, et à ses deux extrémités, une ouverture d'entrée 2 et une ouverture de sortie 3 débouchant sur l'axe longitudinal d'un dispositif de conformation 10, ces ouvertures pouvant être refermées par des portes.

Comme on peut le voir sur la figure 1, le chemin de roulement à l'intérieur de l'étuve 1 comprend rouleaux 4, 5 disposés respectivement à l'entrée et à la sortie de l'étuve, destinés à faciliter le coulissement de la pièce de bois à traiter, lors de son introduction et de son extraction dans et hors de l'étuve.

L'étuve est conçue pour maintenir une pièce de bois à traiter dans une atmosphère humide à environ 100°C, de manière à la rendre malléable.

Sur la figure 2, le dispositif de conformation 10 comprend un bâti rigide de forme rectangulaire, comportant deux longerons 11 parallèles formant les bords longitudinaux du dispositif 10, sur lesquels sont fixées des rails 12 disposés perpendiculairement aux longerons et répartis à égales distances le long de ces derniers. Sur chaque rail sont montés coulissants une butée 14 et un organe de poussée 15 comprenant par exemple un vérin hydraulique.

La rigidité du bâti peut être renforcée par un ensemble de barres obliques 17 qui sont chacune fixées sur les deux longerons 11.

La position de chaque butée 14 sur son rail est réglable manuellement.

Selon une particularité de l'invention, la course des vérins 15 est inférieure à la longueur des rails 12. La position ou point d'appui de chaque vérin 15 sur son rail, et donc sa position de départ, est également réglable manuellement.

La partie mobile de chaque vérin 15 sur son rail 12 pousse un chariot mobile sur le rail en direction de la platine de la butée 14 fixée sur le même rail, l'avant du chariot mobile comprenant également une platine.

La position des butées 14 sur leur rail 12 respectif permet de définir le profil longitudinal de cintrage que l'on souhaite donner à la pièce de bois à traiter, chaque vérin 15 permettant de forcer la pièce de bois à traiter, disposée suivant l'axe longitudinal du dispositif de conformation 10, à s'appliquer contre la butée correspondante, de manière à cintrer la pièce de bois.

L'ensemble des vérins 15 est relié par l'intermédiaire d'un circuit hydraulique (non représenté) à une source unique de pression hydraulique 6 et à des pupitres de commande 7.

Avantageusement, chaque vérin est commandé individuellement et peut être bloqué en pression, quatre vérins pouvant être commandés simultanément.

Le dispositif décrit permet également d'effectuer un vrillage de la pièce à traiter en utilisant des cales, par exemple en bois, que l'on fixe sur les platines des butées 14 et des chariots mobiles, par exemple au moyen de vis et d'écrous. Ces cales présentent chacune une face d'appui parallèle ou inclinée par rapport à un axe transversal de la pièce à traiter, en fonction de l'angle de vrillage que l'on souhaite appliquer sur la pièce à traiter au niveau du rail 12 correspondant.

L'extraction de la pièce de bois hors de l'étuve 1 peut être réalisée au moyen d'un treuil 16, actionné manuellement et de préférence électriquement, disposé dans l'axe du dispositif 10, à l'opposé de l'ouverture de sortie 3 de l'étuve 1, d'autres rouleaux 21 à 25 étant prévus sur l'axe du dispositif de conformation entre les rails pour faciliter la mise en place de la pièce de bois sur le dispositif de conformation 10.

Les pièces de bois à traiter sont de forme très allongée, avec une section transversale de forme rectangulaire. Elles sont introduites dans l'étuve 1 à plat en reposant sur leur largeur. En sortie de l'étuve 1, elles sont progressivement relevées pour reposer par leur tranche sur le dispositif de conformation 10, au moyen de dispositifs de retournement 19 disposés entre les rails 12. Au préalable, les positions respectives des butées 14 sur leurs rails respectifs sont réglées de manière à définir le profil de cintrage à réaliser, et les formes respectives des cales fixées sur les platines des butées et des chariots de poussée sont définies en fonction du vrillage à réaliser.

De même, on règle les positions respectives le long des rails 12 des points d'appui des organes de poussée en fonction de la position des butées et de la course maximum des vérins 15.

Dans le cas de la construction d'une coque de navire, l'écartement des rails 12 correspond avantageusement à l'écartement des membrures de la charpente sur laquelle doivent être posées les pièces à traiter. Dans ce cas, la position longitudinale de la pièce de bois sur le bâti doit être également ajustée de manière à ce que les parties de la pièce sur lesquelles les cales vont s'appliquer soient celles qui sont destinées à venir au contact des membrures de la charpente.

Dès que la pièce à traiter est en place sur le bâti entre les cales des butées 14 et les cales des chariots de poussée, les vérins 15 sont actionnés les uns après les autres, par exemple par groupe de quatre, de manière à appliquer la pièce contre chacune des cales des butées. Les forces respectives exercées par les vérins 15 permettent à la fois de cintrer et de vriller la pièce à traiter. Lorsque la pièce à traiter est appliquée contre toutes les cales de butée 14 par les vérins, la pression dans les vérins est maintenue pendant quelques minutes, de l'ordre de 15 minutes, le temps que la pièce refroidisse et sèche. Ensuite, la pression dans les vérins peut être relâchée, de manière à rétracter les chariots de poussée le long de leurs rails respectifs, la pièce de bois ainsi traitée conservant le cintrage et le vrillage ainsi appliqués.

Il suffit alors de mettre en place et de fixer la pièce ainsi conformée sur les membrures de la charpente, cette opération ne nécessitant normalement pas d'effort supplémentaire de mise en forme.

A titre d'exemple, le bâti du dispositif de conformation 10 présente une longueur de 11,5 m et une largeur de 4,5 m et comprend 18 rails sur chacun desquels sont montés coulissants une butée réglable 14 et un vérin 15 ayant une course de 1,2 m, les positions respectives du point d'appui du vérin et de la butée étant réglables sur toute la longueur du rail. Un tel dispositif permet de traiter des pièces de bois en chêne ayant 11,5 m de longueur, 36 cm de large et 16 cm d'épaisseur pour leur donner une flèche de cintrage de 1,6 m et une distance de vrillage de 10 cm.

Il est à noter que grâce à l'invention, le traitement d'une pièce de cette taille nécessite uniquement l'intervention de deux opérateurs.

Sur les figures 3 et 4, les rails 12 sont constitués de deux éléments profilés 12a, 12b à section droite en forme de I fixés sur les longerons 11 parallèlement l'un à l'autre.

Chaque butée comprend une glissière 31 de section droite en forme de C engagée par coulissement sur la partie supérieure des éléments profilés en I, de manière à envelopper les ailes latérales supérieures extérieures des profilés en I. Une platine 32 est fixée sur cette glissière 31, perpendiculairement à l'axe longitudinal de celle-ci, le maintien en position de cette platine étant renforcé par une équerre 33 fixée sur la glissière 31 et la platine 32 perpendiculairement à celles-ci.

Chaque butée 14 peut être bloquée sur son rail, par exemple au moyen de goupilles introduites simultanément dans des perçages 39 réalisés dans la glissière 31 de la butée et dans des perçages de blocage formés dans les ailes latérales supérieures intérieures du rail 12. A cet effet, chaque rail 12 comprend une pluralité de perçages de blocage uniformément répartis sur sa longueur, ce qui permet d'obtenir un réglage grossier de chaque butée.

L'intervalle entre deux perçages de fixation adjacents, formés dans les rails 12 peut être de 10 cm.

Pour permettre un réglage plus fin, on peut prévoir que chaque butée 14 comprend deux parties reliées entre elles par une tige filetée, à savoir un corps de butée fixée au rail 12 par des goupilles et une partie fixée à la platine 32, chaque partie comprenant un tronçon de glissière 31 monté coulissant sur le rail. La distance entre le corps de la butée et la platine 32 est réglée par la tige filetée qui traverse des perçages taraudés prévus dans la partie fixée à la platine ou dans le corps de la butée.

La platine 32 comprend des bords latéraux, de manière à former une cavité prévue pour recevoir une cale 34 qui peut être fixée sur la platine 32 au moyen de vis engagées dans des perçages 36 formés dans les bords latéraux de la platine. La cale 34 peut comprendre un rebord inférieur 36 et un rebord supérieur 35 entre lesquels vient s'engager la pièce 13 à traiter de manière à maintenir celle-ci verticalement pendant le serrage des organes de poussée contre les butées.

Sur la figure 5, chaque organe de poussée 15 comprend un vérin hydraulique 40 constitué d'une partie fixe 41 formant une cavité cylindrique fermée par un piston solidaire d'une tige de piston 42. La cavité cylindrique est fixée sur une glissière 31' ayant la même section que les glissières 31 des butées 14, de manière à pouvoir être monté coulissant sur un rail 12. Des perçages 39' sont prévus dans la glissière pour recevoir des goupilles de blocage de la partie fixe 41 sur le rail 12.

L'extrémité libre de la tige de piston 42 comprend des moyens de fixation 43 pour venir se fixer sur un chariot de poussée 18 ayant une forme sensiblement analogue à celle d'une butée 15. Ainsi, le chariot de poussée comprend une glissière 31" de profil identique aux glissières 31 et 31' pour pouvoir coulisser sur un rail 12, et une platine 32' conçue pour recevoir une cale 34 et fixée sur la glissière 31" par l'intermédiaire d'une équerre 33'. Les moyens de fixation 43 de la tige de piston sont fixés sur la glissière 31" et éventuellement sur l'équerre 33'.

Selon une variante de l'invention, chaque butée est également montée sur un organe de poussée respectif, comprenant par exemple un vérin.

Avantageusement, l'ensemble des organes de poussée de part et d'autre de la pièce à traiter est commandé par un système de commande numérique dans lequel on introduit les cotes de la pièce à réaliser, ce système déterminant les positions respectives des vérins à atteindre pour conformer la pièce à traiter, en fonction des cotes introduites.

Les inclinaisons respectives des faces d'appui des organes de poussée peuvent également être réglées par des organes d'actionnement, par exemple hydrauliques, commandés par le système de commande numérique, à partir des caractéristiques de la pièce à réaliser.